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La Nouvelle République

On y était : le feu de la création par Diabolus in musica

par Philippe Haller

Publié le 03/07/2021 à 06:25 | Mis à jour le 03/07/2021 à 06:25

Dans le chœur de l’église Saint-Julien où, par-delà le temps, l’élan novateur des bâtisseurs du Moyen-Âge s’unit à l’art des maîtres verriers contemporains, la messe Notre-Dame de Guillaume de Machaut et le compositeur Thierry Machuel célébraient, avec la création mondiale de Notre Dame des flammes, l’improbable rencontre des audaces musicales du XIVe siècle et celles du langage d’un musicien contemporain.


En cette année où l’ensemble fête 30 ans d’émerveillements partagés, quatre chantres de Diabolus in Musica alliaient, sous la direction d’Antoine Guerber, leurs voix à celle de la chanteuse bretonne Marthe Vassallo, soutenus par la guitare électrique et le théorbe de Bruno Helstroffer. Dès les premiers instants, sous les piliers baignés de lumière rouge sang, en sons saturés, distordus, mystérieux, de la guitare jaillit la « diabolique » étincelle qui va incendier la musique de Machaut. Au cœur de la supplique du Kyrie, s’élève alors la voix de Marthe Vassallo clamant, poignante, avec les mots de la poétesse Louise Labbé, la souffrance humaine de la « brûlure d’amour ».


Le brasier flamboyant gagne très vite tout l’édifice, en antiennes sauvages de guitare, en incantations de feu, en madrigaux à tirer des larmes. Préservant le Credo, l’incendie traverse le Sanctus devenu fournaise, jusqu’à l’Agnus qui peu à peu s’éteint, avant la clameur d’un fascinant Ave Maria, venu du fond de l’âme et des entrailles de la tradition, entre invocation et bacchanale, comme un cri d’espoir alors que tout est consumé, que « tout est consommé ».